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Othoniel en surplace et en surface

22/08/2017

S’il ne fait que donner l’illusion d’un sens et d'une démarche conceptuelle finalement presque absents, sauf à être presque exclusivement plastique-décoratif…

Connu pour être le créateur de la sortie de métro la plus déjantée de Paris depuis Guimard1, Jean Michel Othoniel expose son travail sous deux formes cet été. Une sorte de visite d’atelier au Carré Saint-Anne à Montpellier permet d’entrer dans l’intimité du son travail de recherche et d’expérimentation. A Sète, c’est au Centre d’art contemporain qu’il faut aller.

Dans les salles difficiles du Centre d’art Contemporain de Sete, l’artiste s’est pour l’essentiel consacré à la mise en espace et en scène de quatre types d’œuvres : une énorme vague à la forme littérale, faite de centaines de briques de verre, un ensemble de sculptures sur le thème apparent du buste sur un socle,  des « colliers » et des « spirales » faits de boules de verre et évoluant dans l’espace, une série de tableaux noirs et blancs, interprétations/ empreintes librement mises en images à partir des mêmes matériaux et sérigraphies. L’exposition est intitulée. En complément, alignés par dizaines sur des murs aux apparences de coursive, des dessins et des aquarelles retracent le travail préparatoire. 

A Montpellier, le ton général donné d’entrée de jeu consiste à rendre sensible autant que faire partager des sources expérimentales et une bibliothèque personnelle à l’origine de ses inspirations. Dans la nef, au sol et dans l’espace de l’ancienne édifice religieux sont ainsi présentés une chaussée pavées de briques de verre de couleur bleu foncé, des assemblages divers de pièces de verre de toutes formes : suspensions de boules plus ou moins transparentes et de tailles différentes, compositions érotiques de formes évoquant des lèvres et de langues lascives de toutes les couleurs.

Leur présentation et leur scénarisation mises de côté, l’ensemble des deux expositions fait apparaître des faiblesses dont la plasticité du vocabulaire formel et visuel décidé paraissent être qu’un signe mais un symptôme inquiétant. Othoniel semble en effet se suffire et se satisfaire du succès d’estime (indéniable et mérité) de son entré de métro parisienne et brader sa créativité autant que son humour. Et ce qui d’emblée pouvait amuser et ravir agace et rabougrit à force de jouer sur le seul paramètre du plaisir et d’une naïveté enfantine. N’était ce l’unité de formes et d’assemblages qui marque indiscutablement le style particulier d’Othoniel, style fait d’esthétique décorative et évènementiel, des compositions évoquant un penchant pour la répétition et l’empreinte, on serait en effet vite réduit à un fond du travail et de productions aussi vaguement décoratif que cruellement mince. Car ce travail dont l’abstraction formelle peut faire rappeler des esthétiques proches des années 70 se borne la plupart du temps à donner le sentiment de se chercher un sens davantage que d’en avoir. De sorte qu’aux répétitions de mêmes compositions et des mêmes mises en scène font suite des questions concernant les mêmes insatisfactions formelles et visuelles.

Pour quoi tout cela ? Pour quelle esthétique ? Quelle sollicitation chez le spectateur ? Quels appels de compositions : environnement, œuvre in situ, performance, pur concept, paysagisme théâtral, scénographie ? L’art d’Othoniel peut déjanter à tout va, vivre de ses excès de décoratif, de l’excellence de son artisanat du verre… S’il ne fait que donner l’illusion d’un sens finalement presque absent mais uniquement plastique-décoratif, il ne sera pour le spectateur qu’un art à la fois sans surprise, « probablement » factice, ou, pour résumer, d’une créativité de surface.

Août 2017

1- Paris, Place Colette, face à la Comédie Française.