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Claude Bellegarde galerie Guillaume

04/05/2019

Claude Bellegarde expose peu et travaille beaucoup… à ce qui constitue le fond dans sa peinture…

Claude Bellegarde expose peu et travaille beaucoup à ce qu’il semble, avec la série de toiles et de peintures sur papier exposées à la galerie Guillaume. Pour dire les choses autrement et s’approcher au plus juste de ce qui constitue le fond dans sa peinture, Bellegarde évolue et conçoit avec sérénité que peindre ne peut qu’être le paradoxe sans solution d’une pensée à distance exprimée par des gestes intuitifs ; être artiste c’est exister par des détachements spontanés, livré à la peinture seule comme Claude Bellegarde est artiste peintre. Sur les murs de la galerie, les peintures sur toile ou sur papier, comme toujours vivement colorées semblent des compositions muries et les chemins d’une activité gestuelle en partie incontrôlée. Partout, le format tombe au profit d’une véhémence sensible dans laquelle la couleur – comme première matière picturale –  et les rythmes verticaux et ascendants cinglent et s’emportent dans les déploiements lyriques de gestes jazzy. Intitulée « Partition chromatique » l’exposition tient à ce propos son sujet.

Le peintre fait encore tomber les formats en ordonnant son travail pour lui faire embraser l’espace, comme une architecture s’autogénère en flammes intérieures. Concentrées, les forces chromatiques font exploser dans chaque tableau les géométries supposées servir de modèles, l’instinct et l’hors temps d’une esthétique de l’émotion immédiate transgressent toute norme et font diverger les sujets en donnant l’impression d’une inspiration générale au-delà du réel. Pour le spectateur, c’est la débandade, le peintre débarrassé des contraintes temporelles ou des manières codées se borne à peindre comme il ressent ; libre à quiconque d’en décomposer son œuvre et s’y perdre en confusions. Bellegarde s’échine à penser comme il peint dans l’instant où il « trouvaille » un chemin présumé. Apparemment simples, les formules des tableaux deviennent complexes, plus rien n’y semble centré, tout oscille entre les limites de chaque subjectile, pris dans les filets de puissances qu’on sent simultanément réelles et métaphysiques ; la richesse et l’éclat des couleurs éclairent la recherche expressive du peintre. Sur les tableaux décomposés, les surfaces débattent, s’invectivent, se complètent, s’interrompent, semblent se remplacer momentanément ; quelquefois, on surprend des ensembles de formes simplement complémentaires, il arrivent aussi qu’un unisson produise des effets d’accords. On l’a dit, les couleurs explosent d’éclats, tantôt elles hurlent et tantôt elles râlent. On entend les gestes de l’artiste respirer à pleins poumons, la plupart du temps expirant d‘un feu entièrement intérieur, le reste du même temps vibrant et pulsant comme une jam cession. En ne représentant rien mais en se référant aux puissances de la peinture seule, les œuvres font de chaque détail travaillé une part du sujet, et d’une seule caractéristique formelle un objet intensément pictural.

Cette peinture apparemment brute de décoffrage, abstraite par convention, hypercolorée par conviction est d’une sincérité sans façon ni réserve de la part d’un artiste libéré d’une culture que, sans contradiction on devine profonde. Les tableaux, peints à vif ne semblent précédés par aucun dessin d’ordre. Les gestes du pinceau disputent aux élans du corps et du sentiment comme des musiciens s’accordent en improvisant ensemble. Le regard du peintre, arbitraire et assumé, provocateur et méditatif, semble se résumer aux œuvres. Faut-il pour le comprendre s’engager sur la piste d’un artiste supposé incarner des visions ou ne donnant libre cours qu’à sa conception personnelle de l’art ? A travers la liberté de son style et son apparente révélation personnelle, la peinture entière de Bellegarde s’appuie sur des forces humaines telluriques. Dont la puissance et l’intensité fascinent !