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Légèretés poétiques d’Olivier Cans à l’espace Canopy

06/10/2019

A plat ou en volume, illustratif ou informel, l’art d’Olivier Cans se joue d’être prolixe ou redondant, imprécis et éparpillé ou au contraire concentré…

Sur des feuilles légèrement beiges de dimensions conventionnelles, Olivier Cans dispose, répartit, dissémine, ordonne ou, selon les cas et son humeur, organise des assemblages hétéroclites d’images et de représentations de toutes natures. Dans une vie parallèle, il sculpte et met en scène de la même façon des personnages inventés dans des installations d’apparences spontanées. Aucun autre fil créatif apparent excepté quelques ajouts ponctuels de griffonnages divers susceptibles d’être pris pour des objets textuels. Olivier Cans est essentiellement un artiste plasticien qui s’invente.


Que ce soit à plat ou en volume, illustratif ou informel, l’art d’Olivier Cans se joue d’être prolixe ou redondant, imprécis et éparpillé ou au contraire concentré. S’il assemble ou rapproche des fragments de papier, les vestiges de produits divers, toutes sortes de bouts de choses indéterminées ou frivoles, s’il recueille partout et en l’état des traces de vies passées ou passagères, c’est, semble t-il, pour mieux apparenter des couleurs et des traits variés, brusquer de nouvelles apparitions de formes ou exploser des écritures en jeux de mots et variations typographiques libres … Souvent, cet art tout de combinaisons et d’humour fugaces ressemble à un couloir pour coups de vent, à des traces et effacements mystérieux, des expériences plastiques en mouvement continu. Pour le spectateur des œuvres d’Olivier Cans, il n’est question que d’aimer l’inattendu en découvrant son apparition.


Formé dans les classes de Claude Viallat et Annette Messager aux Beaux Arts de Paris, OlivierCans se souvient qu’à l’évidence la pratique artistique vit d’aventure et de culture. Chacune de ses œuvres s’y développe en tant que commencement et ensemble de croisements ou escales passagères. Dans la galerie, que ce soit au sol ou sur les cimaises, les petites installations de sculptures et les œuvres doucement encyclopédiques sur papier s’animent et parlent de contes, de langage de rue, de graffitis et de poésie textuelle ou sonore. En les regardant, on se dit que, subrepticement, Olivier Cans en profite pour glisser quelque hommage ému à des œuvres et des artistes chers à son cœur, que ses mains serrent celles de Jean Michel Basquiat, William Burroughs, Brion Gysin, Bernard Heidsieck ou Jean Michel Alberola… Des plasticiens et poètes, justement !

 

 Dans les compositions faussement hasardeuses d’Olivier Cans, des éléments se répètent, d’autres ne semblent qu’apparaître, certains, plus rarement, sont des traces. A quelques endroits, un effet d’ombre, de lumière ou simplement une technique suggestive est associé à un temps d’interrogation. On en cherche l’objet, on en mesure l’intérêt sans guide ni assurance, on se laisse porter, innocemment séduire, on tâtonne, ça bouge, ça oscille et ça s’éclipse dans un brouillard improvisé. A proximité, une ligne de texte tournicoté comme un phrasé oulipien évoque un son, suggère un phylactère, donne de l’écho à un hypothétique lecteur-regardeur. Episodiquement, un/des visages donne(nt) l’impression de s’entretenir, chuchoter et se regarder ou interpeller le spectateur. Dans leurs espaces ouverts, les œuvres s’ordonnent en moments que l’artiste peuple de feux follets ironiques.

 

 En bas ou en haut des feuilles, Olivier Cans a régulièrement mêlé aux dessins un texte semblable à un exergue sur un journal d’information. Un calembour mime avec ironie une légende ou un titre qu’on n’attend pas dans les variations d’écriture. Chaque texte, par ailleurs discrètement soutenu par une manipulation plastique apparemment saugrenue, surprend par un imprévu qui fait sens. Qu’est ce qui, du texte ou des images dessinées ou non, parle pour l’artiste et pour son travail ? Comme pour les sculptures de bric et de broc promues au rang d’événements fortuits, l’exposition s’avère un théâtre à la fois burlesque, tendre, ténu et facétieux où l’activité créative de son scénographe qu’on devine incessante s’imagine à travers ses inventions.