ZeMonBlog
01/01/2019
Les arbres sont des taches libres ou des graphismes passagers, les âmes confidentes, rêveuses ou joueuses d’un artiste qui les contemple en silence…
Il aura suffi de quatre salles en enfilade et la sobriété extrême de sa présentation pour faire d’une donation d’Alexandre Hollan au musée Fabre le magicien discret d’une exposition émouvante.
Il se trouve qu’Alexandre Hollan, natif de Hongrie, travaille dans un coin de garrigue proche de Montpellier, au calme de cet arbre dont le motif l’inspire au point d’y sourcer la force d’un logotype personnel. Evoluant comme un thème largement autonome, l’arbre également transfiguré par une profondeur symbolique palpable expose sur les cimaises son plaisir de peindre devenu métaphysique.
L’exposition débute avec un entretien filmé de l’artiste qui sobrement livre par bribes ses cheminements créatifs. Convaincu de correspondances subtiles entre l’observation directe et l’extrapolation dans l’atelier, chaque propos clarifie quelques clés et chapitres d’un conte intime. « L’invisible est le visible », l’intitulé de l’exposition croise et file avec pudeur les confidences abstraites ou allusives du peintre sur ses possibilités d’images aussi bien que des problématiques que Maurice Merleau Ponty ne renierait pas. Dès la première salle et la première vitrine, l’ordre chronologique des œuvres réfère en ce sens aux aléas d’une démarche figurative hantée autant par l’acte de faire que par l’espoir de le sublimer.
Dans chaque salle, au fur et à mesure des œuvres, le peintre, tout à ses dessins (desseins) ou ses peintures (portraits d’arbres), autrement dit tout aux croquis ou aux pochades directes, tout à leurs études prolongées sur toiles, développées en leporello ou synthétisées dans l’atelier comme des signatures, entretient l’idée d’un art livré aux mystères de ses multiples formes de visions imaginaires. Et c’est en ce sens qu’il faut attacher une importance poétique particulière à l’orientation régulièrement allongée des œuvres, l’arbre fait figure d’Homme devant l’étendue sans fin d’une perspective infinie. Tout aux suggestions d’un monde qu’il juge invisible mais qu’il voudrait parvenir à incarner dans son sujet, Alexandre Hollan floute ou bien gomme l’arrière fond et l’environnement autour des arbres pris pour modèle. Sur pied ou limité à leur branchage, chaque arbre juste silhouetté dans une tache informe ou rapporté à l’analogie d’un nuage vire à une possibilité d’être. De salles en salles, de dessins aux dimensions d’une note confidentielle aux toiles peintes jusque sur leurs tranches, les arbres sont des taches libres ou des graphismes passagers, les âmes confidentes, rêveuses ou joueuses d’un artiste qui les contemple en silence et s’entretient avec eux par le regard.