ZeMonBlog
15/03/2020
Des ambitions artistiques contrastées…
Fiona Rae chez Nathalie Obadia
Peindre, c’est « simple », il suffit de répartir des formes d’aspects esthétiques divers un peu partout sur sa toile, sans souci de les disposer, sans inquiétude quant à leurs sources apparentes ou imaginées. Certaines seront régulières et/ou en couleurs, peut-être purement gestuelles et évoluer en courbes ou en droites plus ou moins orientées, d’autres sauront présenter des effets de matière, de transparences voire d’évanescence ; on cherchera des silhouettes, on tentera des rapprochements… Les souvenirs formels de ce que l’abstraction lyrique américaine a pu produire depuis 50 ans vont être de la fête. Ce sera sympathique, léger, gai, enjoué, gentil, dynamique, éclatant, toujours direct et un peu insouciant, résolument imprégné de vocabulaire plastique, être d’une beauté immédiate et décorative… Ça ne représentera rien, ça réunira dans une sorte de réception esthétique joyeuse et communicative où l’éclectisme sera un fait, ce sera abstrait et titré « Abstractions »… Inimaginable si on songe que créer peut aussi être visuellement, techniquement et/ou stylistiquement questionnant.
Strictement équivalents et identiques, seulement séparés par leurs dimensions, les dessins/œuvres sur papier et les peintures de Fiona Rae actuellement exposés galerie Natalie Obadia œuvrent doctement dans le vide.
Quelques artistes Galerie Hussenot (Denis ColletPark, Elisabeth Penker, Laure Prouvost, Tamuna Sirbiladze)
Des peintures apparemment abstraites, faiblement « mal peintes » (pauvres Matisse, Bram van Velde, Twombly), une installation vaguement mêlée de design et d’« art pauvre » (pauvre design, triste Arte Povera), des visages faits de profils droits ou gauches assemblés de manière un peu photographiques, et d’un style allusivement pop mais terne et osseux, des personnages sculptés suggérant un surréalisme affligeant (pauvre Magritte) et d’une plasticité formelle de même niveau (pauvre Duchamp) pour une exposition référent (de très loin) à l’art conceptuel (injoignable)…
Heureusement que les moyens matériels (évidents) ayant servi à produire les œuvres sont indiqués, sinon on serait déçu de rien devoir retenir de l’ensemble.
Hermann Nitch, galerie RX.
Rien de plus que ce qu’on constatait au même endroit avec l’expo de 2018. Du passé, du passé et du passé… Ressassé, ressassé, ressassé ! De l’« actionnisme » tiède, laborieusement fabriqué, esthétisant et commercial.
Hélène Valentin chez Galerie Fournier
Peu connue, d’origine française et longtemps établie aux USA, Hélène Valentin a produit un œuvre strictement pictural en amitié avec l’expressionnisme abstrait, où l’espérance d’une esthétique à la fois purement spatiale et intemporelle domine. Sur les cimaises, les peintures sur papier ou sur toiles libres happent l’espace environnant et parfois donnent le sentiment de l’absorber totalement. La couleur est toujours liquide et nuancée, évanescente comme une encre diffuse : pas de formes, exclusivement un champ multicolore, visuel et matiériste comme un tissu imprégné irrégulièrement. Sans être sûr d’une démarche d’installation ou d’œuvre in situ revendiquée, je perçois aussi dans cette peinture un goût prononcé de l’artiste pour des possibilités de scénarisation du pictural dans des contextes d’architecture. Quelques œuvres présentent (en ce sens ?) une composition faite de lignes droites fuyant vers un point unique. Au départ informelles, elles structurent un plan symbolique infini à travers lequel une méditation sur le paysage intérieur est sensible. Fortement imprégnées de recueillement et sensiblement plus descriptives qu’allusives, mues par une création plastique à mon sens moins radicale et esthétiquement moins dérangeante que celles de ses contemporains américains (Newman, Still, Rothko, Hoffmann…) ou de Tal Coat, au même moment en France, les peintures d’Hélène Valentin témoignent cependant à l’évidence d’une sensibilité artistique indéniable.